Remis de son échec aux championnats du monde en salle, Renaud Lavillenie a confirmé qu'il était bien le meilleur perchiste au monde actuellement.
Sa saison phare est l'année 2009 où il se révèle avec un titre de champion d'Europe en salle en mars avec 5,81m.
En juin, ce petit gabarit d'1,77m pour 69 kg devient le premier Français à franchir six mètres en plein air, avec un bond à 6,01m.
Deux mois plus tard, il confirme son ascension avec un bronze aux championnats du monde à Berlin à 5,80m.
En 2010, Lavillenie est attendu au coin du bois et craque aux championnats du monde en salle, échouant à 5,45m en qualifications.
"Un jour ou l'autre, il fallait bien que je me plante, que je me plante pour apprendre puis rebondir", explique-t-il.
L'été venu, l'élève de Damien Inocencio rebondit avec neuf victoires sur neuf concours, dont un meilleur saut à 5,94m, avant Barcelone.
A chaque fois, il tente de passer 6,02m, sans succès.
"Plus je tenterai les six mètres, plus j'aurais de chance de les passer et d'avoir le privilège d'entrer dans le cercle fermé des mecs l'ayant réussi", dit-il avec un sourire en coin.
Après son début de saison dominateur, le Clermontois ne se voit pas plus beau qu'il ne l'est.
"Je refuse de dire qu'il y a, désormais, Renaud et les autres", assure-t-il.
"Le jour où il y aura Renaud et les autres, c'est le jour où je serai capable de me mettre en danger en débutant un concours par 5,85 voire 5,90m."
VOLTIGEUR ET FERRONNIER
"Mais ce jour-là n'est pas arrivé. Ce qui m'intéresse, c'est passer des barres, passer des barres pour voler."
Ancien perchiste et aujourd'hui entraîneur national, Gérald Baudouin s'amuse de sa soif de sauter: "Dès qu'il voit une perche, il ne peut s'empêcher de la saisir et de l'utiliser même si la séance prévue ne le prévoyait pas."
A peine né, Renaud Lavillenie suit, dans son couffin, son père Gilles, perchiste amateur, sur le sautoir du petit stade de Cognac.
Du haut de ses quatre ans, il se bricole ses perches "avec un bout de bois, une barre de fer, une tringle en bois, un manche à balai terminés par un bouchon pour sauter un muret, un buisson, un portique, une table."
A sept ans, il signe sa licence à Cognac.
Voltigeur, Renaud Lavillenie est né. Et, voltigeur, il le sera à pied et à cheval :
"Entre dix et quinze ans, je n'ai pas touché une seule perche", raconte-t-il.
"Comme mon père dirigeait alors un centre équestre, je me suis mis à la voltige équestre."
Jusqu'à 20 ans, il monte à cru, debout, en cosaque, assis à l'envers, en faisant le poirier, "maîtrisant élan et vitesse, le tout terminé par une acrobatie comme à la perche."
A 20 ans, il reprend ses perches sans avoir été un junior étincelant juste capable de franchir 4,70m alors que le titre mondial junior se joue à 5,50m.
A l'été 2007, le zébulon lâche ses trois chevaux le jour où il saute 5,45m, une étape vers le haut niveau qu'il ne souhaite "alors pas hypothéquer par une blessure vite arrivée en voltige".
Et s'il n'avait pas été perchiste, le Cognacais aurait aussi pu être ferronnier, un art pratiqué de père en fils chez les Lavillenie.
Représentant la sixième génération, le perchiste a appris le métier, "capable de travailler en soudure, en ferronnerie, faire des serrures, des pieds de table ou des barres".
En attendant de reprendre, peut-être, un jour, l'affaire de fer familiale, Renaud Lavillenie forge ses barres en médailles.
Reuters Sophie Greuil News Yahoo 31/07/2010