1859 : Soigner les blessés des deux camps
Traumatisé par l'hécatombe de la bataille de Solférino, un jeune homme d'affaires suisse, Henry Dunant, entreprend de fonder la Croix-Rouge en 1863 et de poser les bases des premières Conventions de Genève, persuadé que les conflits à venir seront de plus en plus meurtriers.
Né le 8 mai 1828 dans une famille bourgeoise calviniste de Genève, Henry Dunant - son prénom est orthographié aussi comme Henri - baigne dans un humanisme bon teint et s'initie aux affaires, fonde à 27 ans l'Union chrétienne des jeunes gens (UCJG, YMCA en anglais).
C'est un peu par hasard qu'il se trouve aux abords de Solférino, au lendemain de l'affrontement sanglant (40 000 morts et blessés) entre les armées sardes et françaises d'un côté, autrichiennes de l'autre le 24 juin 1859.
Le jeune homme de 31 ans cherche à s'entretenir avec Napoléon III de ses affaires en Algérie, mais il rencontre un champ de désolation et d'agonie.
Très vite, il organise les secours avec l'aide des femmes des villages environnants, et fait soigner indistinctement les blessés des deux camps, une révolution. Mieux, il obtient de l'empereur français que soient libérés les médecins autrichiens prisonniers pour prodiguer des soins.
Pouvoir intervenir rapidement
en temps de guerre
Deux ans après cet épisode, il publie à compte d'auteur Un souvenir de Solférino, véritable reportage de guerre qui en dénonce les horreurs et pose les jalons de ce que pourraient être des sociétés de secours neutres au personnel bien qualifié. Envoyé aux responsables politiques, militaires, aux intellectuels de toute l'Europe, le livre est un succès, bientôt traduit en plusieurs langues.
Dans la foulée, Dunant est soutenu par des compatriotes. Sous le nom de Comité des Cinq, ils vont former dès leur première réunion en février 1863 le Comité international de la Croix-Rouge (CICR).
Les premières sociétés nationales, formées en temps de paix pour pouvoir intervenir rapidement et efficacement en temps de guerre, voient le jour dès 1864. En août de la même année, quinze gouvernements européens et les États-Unis signent la fameuse « Convention de Genève », qui protège les personnels de secours aux blessés. Elle sera ensuite élargie aux règles de protection générale des personnes en temps de guerre.
En 1867, empêtré dans un scandale financier et une faillite retentissante, Henry Dunant est contraint par ses partenaires de démissionner du CICR.
Mis au ban, il quitte la Suisse pour la France, dont il prend la nationalité. On le retrouve à Paris aux côtés de l'actrice de théâtre Sarah Bernhardt, qui sera ambulancière pendant la Commune.
Suivent près de 20 ans d'errance à travers l'Europe pour cet homme ruiné. Il revient en Suisse, où il se soigne dans une pension, notamment pour dépression.
En 1895, Dunant est redécouvert par un jeune journaliste autrichien. Les sociétés locales et nationales, certains grands de ce monde s'émeuvent de son sort : le fondateur de l'humanitaire sort de l'ombre et des soucis matériels.
Ultime consécration, il reçoit en 1901 le premier Prix Nobel de la Paix, qu'il partage avec Frédéric Passy, homme politique pacifiste français, fondateur de la Société d'arbitrage des Nations, ancêtre de l'ONU.
Auteur prolifique, Henry Dunant prévoyait un avenir sombre pour le siècle naissant : « Il semble, en vérité, que désormais, le progrès moderne consiste surtout dans la recherche et la découverte des meilleurs engins de destruction ». Il s'éteint le 30 octobre 1910 à l'âge de 82 ans, avant les deux grands conflits mondiaux.
commenter cet article …